Un texte aux intentions louables mais au périmètre flou
Le projet de loi relatif à l’extension des prérogatives des polices municipales et des gardes champêtres, actuellement en examen, ambitionne d’adapter le cadre d’action des forces locales de sécurité à l’évolution des besoins des collectivités.
Le texte prévoit notamment la possibilité, pour les communes ou intercommunalités, de créer des services de police municipale à compétence judiciaire élargie, sous convention avec le procureur de la République.
Sur le principe, le Syndicat National des Territoriaux (SNT) partage l’idée d’une meilleure coordination entre acteurs locaux et nationaux de la sécurité.
Mais il souligne que toute réforme des compétences doit être précédée d’une réflexion sur les moyens, la formation et les garanties statutaires.
Autrement dit : on ne renforce pas les pouvoirs sans renforcer les protections.
Le risque d’un modèle unique inadapté aux territoires
Le SNT constate que ce projet tend à rapprocher le régime des gardes champêtres de celui des policiers municipaux, au risque d’effacer les spécificités rurales.
Or, la fonction de garde champêtre n’est pas une déclinaison de la police municipale : c’est une police de proximité, au service de la ruralité, de l’environnement et du lien social.
“Assimiler les gardes champêtres aux policiers municipaux reviendrait à nier la réalité des territoires ruraux, où l’équilibre entre prévention, pédagogie et sanction repose sur une connaissance fine du terrain.”
— Analyse interne du SNT, novembre 2025
Le SNT rejoint ici les préoccupations exprimées par la Fédération Nationale des Gardes Champêtres (FNGC) :
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La création d’un double agrément (État et parquet) risque de complexifier inutilement les procédures.
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Le code de déontologie commun pourrait diluer la spécificité du métier.
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L’absence de reconnaissance des véhicules de service ou de catégorie B propre traduit un manque de considération pour les spécificités de ce cadre d’emploi.
Une nécessaire revalorisation du métier de garde champêtre
Le SNT soutient la revendication d’une revalorisation du cadre d’emplois des gardes champêtres.
Le passage en catégorie B, déjà évoqué depuis plusieurs années, apparaît légitime au regard :
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du niveau de technicité des missions (police de la nature, environnement, urbanisme, ruralité),
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de la responsabilité juridique accrue des agents,
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et de la nécessité de rendre la profession plus attractive pour les jeunes générations de territoriaux.
Cette reconnaissance statutaire doit s’accompagner d’une politique nationale de formation cohérente, pilotée par le CNFPT, et adaptée aux réalités du terrain rural.
Préserver la libre administration et le dialogue social
Le SNT met également en garde contre la recentralisation implicite qu’introduit le texte à travers le contrôle du parquet et du préfet.
Les missions de sécurité locale relèvent du maire, chef de la police municipale, et donc de la libre administration communale.
Introduire un pilotage judiciaire trop strict reviendrait à affaiblir l’autonomie locale que la décentralisation a précisément voulu renforcer.
Le SNT appelle en conséquence à un véritable dialogue social avant tout vote parlementaire.
Il propose la mise en place d’un groupe de travail paritaire au CSFPT, réunissant :
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les organisations syndicales représentatives (dont la FNGC et le SNT),
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les associations d’élus (AMF, AMRF, APVF),
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et les ministères concernés (Intérieur, Fonction publique).
Objectif : construire une réforme utile, comprise, et partagée.
Pour une sécurité territoriale équilibrée et concertée
Le SNT plaide pour une approche équilibrée de la sécurité locale, fondée sur la complémentarité des forces plutôt que sur leur uniformisation.
La police municipale, la gendarmerie et la garde champêtre ont chacune leur légitimité, leur terrain et leur culture professionnelle.
“Renforcer les coopérations, oui. Effacer les identités, non.”
— Position du SNT, novembre 2025
Le syndicat défend une “sécurité du quotidien à taille humaine”, respectueuse des réalités territoriales, des compétences communales et des agents qui les incarnent.
Références vérifiables
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Projet de loi sur l’extension des prérogatives des polices municipales et des gardes champêtres, septembre 2025 (data.over-blog-kiwi.com, PDF). FNGC, communiqué du 3 novembre 2025 et dossier revendicatif (gardechampetre-fngc.fr). Avis du Conseil d’État, 28 août 2025 – mention d’un « régime de procédure pénale à géométrie variable ». Banque des Territoires, “Le projet de loi polices municipales examiné en CSFPT” (17/09/2025). Questions parlementaires n° 5570, Assemblée nationale (2023)







